Le développement moteur du bébé, les éléments clés à connaitre

Pourquoi accorder de l’importance au développement moteur du bébé dès sa naissance ?


Aujourd'hui, on remarque que 1/3 des enfants en école maternelle présente des faiblesses motrices. La plupart de ces difficultés peuvent trouver leur origine aux premiers mois de vie du bébé, dans le parcours le menant de la naissance à la marche.


C’est en comprenant comment l’enfant bouge, et ce qui lui est nécessaire pour évoluer en pleine santé, que l’on pourra correctement l’accompagner dans son développement moteur. Cela lui permettra d’acquérir complètement ses compétences motrices pour grandir en toute sécurité et devenir un adulte adroit.

Qu’est-ce que le développement moteur du bébé ?

Le développement moteur du bébé est le processus permettant au bébé d’acquérir des compétences motrices qui lui sont propres et d’évoluer...


de la naissance, où il effectue très peu de mouvements, avec :

  • Une motricité dite primaire ou archaïque,
  • une hypotonie de l’axe et une hypertonie des membres ;

... à un contrôle volontaire progressif de ses postures et de l’ensemble des parties mobiles de son corps, afin de se mouvoir de manière harmonieuse, dans des situations complexes (courir, escalader, enjamber, s’accroupir, etc.).


Ce processus obéit à 4 “lois” :

  • Loi de différenciation :
    Les capacités motrices du bébé débutent par des mouvements simples et globaux, qui s’affinent et deviennent plus précis et complexes. S’opère également une transition de mouvement réflexe ou “automatique” vers un contrôle volontaire.


  • Loi du progrès céphalocaudal :
    Votre bébé, dans son environnement, prend progressivement le contrôle du haut (la tête) vers le bas (les membres inférieurs).


  • Loi proximo distale :
    Bébé améliore le contrôle de ses membres, de la partie la plus proche de sa colonne vers les extrémités, soit des épaules vers les mains et des hanches vers les pieds.


  • Loi de variabilité :
    Il existe une variabilité intra-individus et inter-individuelle. En effet, l’évolution chez un bébé n’est pas constante : elle suit différentes étapes, alternant entre des périodes de progression rapide, suivies de stagnation, avec de possibles régressions. Il y a également une grande variabilité entre les enfants qui ne suivront pas les mêmes étapes au même moment ni dans le même ordre.
    Chaque enfant évolue vraiment à son rythme.
    Voilà pourquoi on n’utilise pas seul l’âge des différentes acquisitions motrices pour suivre les progrès de bébé.


Le développement normal de la motricité est complexe, multifactoriel et fait intervenir plusieurs éléments (que je ne pourrais pleinement traiter dans cet article) :

  • La maturation du système nerveux et le développement cérébral, qui ne peuvent pas être accélérés,
  • Le développement de la posture,
  • Le développement physique et musculaire, qui dépendra de prédispositions génétiques et de l’expérimentation,
  • Le développement de la coordination, qui sera possible par la réplétion et demande du temps,
  • Le développement cognitif et affectif, qui sera influencé par l’environnement humain,

etc.

C’est pourquoi on parle alors de développement psychomoteur.


Idée pour bien accompagner la motricité de bébé

Finalement, les capacités motrices visibles de l’enfant, c’est-à-dire ses mouvements observables depuis l’œil de l’adulte, ne sont que la portion émergée de l’iceberg du développement moteur. Lui-même représente une infime partie du développement global de l’enfant.

Maman observe le développement moteur de son bébé

Quelles sont les étapes du développement moteur du bébé?

Nous l’avons vu, le développement moteur du bébé ne peut se résumer à une succession d’étapes linéaire. Cependant, lorsque l’on observe les enfants, on remarque un certain nombre de transitions motrices par lesquelles ils passent presque tous.


Lorsque bébé se développe, sa première motricité est involontaire (dite réflexe). Les réflexes les plus connus sont :

  • La marche automatique
  • Le réflexe de Moro
  • Le grasping
  • Réflexe tonique asymétrique du cou

Dans la suite du développement de la motricité globale, il serait réducteur de parler uniquement des positions : plat dos, plat ventre, retournements, rampe, quatre pattes, tenir assis et enfin la marche.


En réalité, au cours du développement du nourisson vers la marche, on distingue plus de 50 transitions motrices dont la succession n’est pas linéaire : plusieurs transitions motrices peuvent évoluer en parallèle.


Par contre, l’acquisition de certaines transitions motrices s’avère nécessaire pour accéder à des apprentissages de qualité menant aux transitions suivantes.


Je préfère alors parler de “chemin moteur” ; cela permet de mieux prendre en compte cette variabilité.


Un peu comme sur une carte offrant la possibilité au bébé de choisir différents itinéraires (différentes capacités motrices), en fonction de son environnement et de tous les autres facteurs influençant sa motricité.


Ces différents chemins moteurs sont possibles par éveil au monde et un contrôle du tonus musculaire. Ils assurent une maîtrise progressive et harmonieuse des différents mouvements possibles.


Petit à petit, bébé va “habiter” son corps, pour s’en servir comme d’un outil utile à son développement, et se construire en tant que personne à part entière.


Les chemins du développement moteur du bébé de la naissance à la marche

Avec les chemins moteurs, on voit que les capacités motrices du bébé progressent avec le temps et, surtout, en fonction du développement des autres éléments du développement global de bébé.


Cet article s’arrête à l’apprentissage de la marche. Évidemment, le développement moteur de votre enfant continue après cette période pour développer des capacités plus complexes (courir, sauter, taper dans un ballon de foot …). La latéralité c’est-à-dire l’acquisition d’une main dominante se fera également plus tard.


Ce processus est dynamique et très variable selon les individus On ne peut donc pas donner d’âge précis de la réalisation de ses transitions motrices pour savoir s’il y a un retard de développement.

Idée pour bien accompagner la motricité de bébé

Ce qui importera et devra être observé, c’est de voir comment bébé organise sa motricité, ses mouvements et la qualité du mouvement, plutôt que le simple résultat.

Ceci nous poussera à faire attention que, pour des raisons de “sécurité”, on ne bloque pas les enfants avec du matériel contraignant la liberté de leur mouvement, alors que l’un de leurs besoins essentiels consiste justement à pouvoir bouger et expérimenter leur motricité.


Deux situations extrêmes vues dans mon cabinet pour illustrer ce propos :


  • Je préfère voir un enfant qui ne marche pas encore à plus de 21 mois mais avec des mouvements de qualité dans les trois plans de l’espace et qui évolue dans son environnement sereinement et avec assurance. (Escalade, se relève du sol avec un appui, attrape ses jeux, etc..)
  • Plutôt qu’un enfant de 10 mois qui commence à marcher avec des mouvements raides, robotiques mais sans réaction parachute.


Pour parcourir complètement ces différents chemins moteurs et maîtriser l’ensemble des transitions motrices, cela prend du temps. Par exemple, on estime que ce n’est qu’entre 6 et 8 ans que l’enfant acquiert une marche similaire à celle de l’adulte !


Dès lors, on évitera de mettre bébé dans des positions qu’il n’est pas capable de trouver seul afin qu’il ne grille des étapes et ne puisse vivre et ressentir des expérimentations motrices indispensables à sa bonne évolution.

L’utilité de la motricité.

L’être humain évolue depuis des millions d’années. Et si les enfants ont besoin de passer par ces différentes transitions motrices, c’est que chacune d’elle aura une importance dans leur développement moteur et global, à court et moyen termes.

En voici quelques exemples :

  • Lorsque bébé fait ces sortes de pompes, cela lui sera utile pour travailler ses réactions parachutes ou quand il devra descendre en marche arrière les escaliers.


  • Le ramper permettra de travailler la coordination de ses mouvements. Plus tard, la coordination pour stabiliser le côté en appui, et le mouvement synchronisé œil-main de l’autre coté, l’aideront à tenir sa feuille et écrire dès son entrée à l’école.


  • Laisser le temps à bébé de se relever en position chevalier servant le poussera à appréhender la notion de hauteur et la représentation 3D de son environnement.


  • La motricité autorisera également le bébé à aller vers les autres. Cette entrée en relation soutiendra sa socialisation.


  • La motricité représente un moyen d’expression dès la naissance. etc...

Il convient donc de :


  • Repérer le plus tôt possible d’éventuelles difficultés motrices qui pourraient impacter son développement global à court, moyen ou long terme.

La sensori-motricité facteur du developpement moteur du bébé

Au cours de cette évolution le long des chemins moteurs, le bébé appréhendera la gestion de chaque muscle. Il intégrera leur rôle dans la mobilisation de chaque articulation et comment les membres sont positionnés dans l’espace. Il ressentira où se situe son centre de masse et saisira comment positionner son centre de gravité dans un polygone de sustentation (surface au sol entre les différents appuis), qui se réduit au fur et à mesure de son développement, l’obligeant à découvrir et améliorer son équilibre.


Pour gérer l’ensemble de ces éléments, le bébé doit pouvoir compter sur des systèmes ayant deux finalités : l’informer de comment il se situe dans son environnement et le stimuler à se mettre en mouvement.


Ces systèmes reposent principalement des différents sens que possède le bébé :

  • Le sens du toucher,
  • La proprioception,
  • Le système visuel,
  • Le système vestibulaire,
  • Le système auditif,
  • Le système gustatif.

Ces interrelations indispensables entre les sens et la motricité, contribueront à l’acquisition d’une motricité de qualité, avec des mouvements harmonieux et des postures stables. C’est ce que l’on appelle la sensori-motricité.


Voilà pourquoi, au cours de son développement moteur, le bébé fera progressivement des expérimentations motrices, des essais, et ressentira ce qu’il se passe. Il y prendra plaisir et recommencera pour retrouver ce plaisir.

Bébé sur le ventre pour la stimulation de la senso

Comment favoriser le bon développement moteur de bébé ?

Tous les enfants en bonne santé portent en eux les bases génétiques d’un bon développement moteur.


Cependant, les études actuelles démontrent que cela est insuffisant pour atteindre une évolution motrice de qualité. Elles suggèrent que l’expérimentation motrice du bébé permettra de sélectionner et renforcer les synapses (connexions entre deux neurones) utiles dans des groupes neuronaux. À condition d’être dans un environnement favorable.


Bébé apprend par sérendipité ses différentes possibilités motrices, selon ses capacités actuelles.

(La sérendipité, c’est le fait de découvrir et apprendre par hasard.)


En réalité, bébé tentera plusieurs mouvement jusqu’à trouver le plus efficace, économe et pertinent pour son évolution. Il se crée ainsi tout un répertoire de possibilités motrices variées pour s’adapter aux différentes situations rencontrées.


Cela implique que l’on devra laisser libre son enfant de faire une exploration active des capacités de son corps et de son environnement.

Bébé à quatre pattes en motricité libre

Inutile donc de lui apprendre ou enseigner comment réaliser les différentes transitions motrices. L’adulte doit être là pour proposer un environnement adapté et les conditions nécessaires afin que bébé fasse ses propres découvertes, par lui-même.

Pour cela, il convient :

  • D’assouvir les besoins primaires du bébé (manger, dormir, propreté).
  • L’adulte doit également faire preuve de bienveillance et d’amour envers son enfant pour répondre à ses besoins de sécurité et lui permettre d’explorer sa motricité en confiance.
  • De respecter le rythme de l’enfant pour qu’il construise les bases de sa motricité. Elles constitueront le socle sur lequel il pourra s’appuyer dans l’élaboration de mouvements plus complexes par la suite, et finalement se mouvoir avec agilité.
  • De reconnaitre et utiliser le fonctionnement d’apprentissage de bébé par imitation. Cela l’aidera à découvrir de nouvelles possibilités motrices et à pleinement se développer.
  • De lui proposer un environnement matériel adapté à ses besoins et varié , avec des stimulations utiles et pertinentes : il saura ainsi s’en servir et les réutiliser dans ses différents apprentissages.
  • De laisser à l’enfant la possibilité de répéter ses expérimentations motrices, voire régresser, et favoriser ainsi son apprentissage, avec une bonne intégration de ses acquisitions motrices.

Afin d’éviter l’apparition des troubles de la motricité, les parents doivent pouvoir proposer un accompagnement qui réponde à tous ces critères.

Voici quelques pistes de réflexion :

  • Le concept de motricité libre développé par Emmi Pickler,
  • La transformation des activités de la vie quotidienne en occasions régulières de proposer des stimulations adaptées : ex. lors du portage, du bain, du change, etc.. ;
  • Les principes de base d’une stimulation motrice réussie ;
  • Proposer à son enfant des vêtements adaptés ;
  • Ne pas oublier que c’est en jouant que l’enfant découvre et apprend ; etc..

Le développement moteur du bébé, mais pas que !

Je l’ai déjà évoqué dans l’article : le développement moteur n’est qu’une partie du développement global de l’enfant. On parle alors volontiers de développement psychomoteur. Ce dernier regroupe différentes dimensions et, pour illustrer ce propos, je reprendrais ci-après des extraits d’A nous de jouer du TMVPA.

Le développement moteur influence :

  • Le développement affectif, car les nouvelles capacités de l’enfant lui donnent de la fierté et de l’autonomie et soutiennent sa confiance et son estime de soi ;
  • le développement social, car ses habiletés motrices lui permettent d’augmenter ses interactions et d’ajuster ses comportements aux règles sociales ;
  • le développement cognitif, car en améliorant sa capacité à manipuler et à se mouvoir, l’enfant développe sa capacité à observer, à connaître, à comprendre et à résoudre des problèmes ;
  • le développement langagier, car la verbalisation par l’adulte des expériences vécues par l’enfant lui permet d’apprendre à parler et d’intégrer le vocabulaire lié au corps, à ses mouvements, à l’espace et au temps. L’apprentissage du langage se fait par l’interaction.

Le développement moteur est influencé par :

  • Le développement affectif, car un lien d’attachement bien établi permet à l’enfant de se sentir assez en sécurité pour explorer, prendre des risques et chercher de l’aide lorsque nécessaire;
  • le développement social, car plus l’enfant interagit avec les autres, plus il apprend, notamment par imitation. L’accroissement de ses habiletés sociales lui permet de réaliser des tâches exigeant des habiletés motrices de plus en plus complexes ;
  • le développement cognitif, car plus la capacité à penser et à réfléchir de l’enfant s’accroît, plus ce dernier sera capable d’anticiper les conséquences de ses actes, d’ajuster ses gestes et de relever des défis demandant des habiletés motrices plus complexes ou plus efficaces ;
  • le développement langagier, car plus l’enfant maîtrise le langage parlé, plus il peut ajuster ses actes aux informations reçues (ex. : consignes ou conseils) et son expression motrice à des propositions ou à des concepts plus précis.
Schéma des interrelations entre la motricité et les autres dimensions

Conclusion

Le développement moteurde votre bébé s’intègre dans le développement global de l’enfant, il est en interrelation continue avec les dimensions intellectuel, sociale et morale, cognitive, langagière et affective.


Tout enfant connait un développement moteur à un rythme qui lui est propre, dépendant de son bagage génétique comme de son environnement.


Il appartient au parent de proposer une activité motrice régulière à son nouveau-né avec des stimulations individualisées, adaptées à l’évolution et aux capacités de son enfant pour qu'il prenne confiance en lui et en ses capacités. Elles lui seront nécessaires pour pleinement se développer le long de son chemin moteur.


Ce chemin le mènera de la naissance à la marche, puis à des activités motrices plus complexes de qualité.

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Boite à outils motricité de. bébé





jonathan gillaux kinésithérapeute

Jonathan

Kinésithérapeute en pédiatrie