La motricité libre pour les bébés : comment favoriser leur développement

Le développement de la motricité globale chez le bébé est une étape essentielle à son éveil et son développement cognitif. On parle aussi de développement psychomoteur.


Durant cette période, il y a maturation du cerveau : sa structure change. Le bébé crée ses connexions neuronales et construit les circuits qui lui permettront de bouger plus tard avec agilité. Cela engendre une interaction forte entre développement moteur et neurologique.


Pour bien comprendre le concept, je vais utiliser une analogie avec la cartographie de votre nouveau trajet maison-travail après un déménagement.


Vous disposez de diverses options de transport : à pied, à vélo, en moto, en voiture, en transport en commun….


Chacun de ces moyens de transport sont l’équivalent de nouvelle compétence motrice du bébé comme le ramper le 4 pattes la marche …


De plus, pour chaque mode de transport, il existe différentes routes plus ou moins directes. L’ensemble de ces routes représentent toutes les connexions qui ce créer dans le cerveau de votre bébé lorsqu’il découvre de nouvelles possibilités motrices.


Avant de pouvoir découvrir toutes les routes qui vont vous mener à votre travail, cela va vous prendre du temps tous comme il faut du temps à bébé pour découvrir toutes ses compétences motrices. De la même manière que votre voisin découvrira les routes pour se rendre au travail dans un ordre différent.

De la même manière, chaque enfant est différent et suit donc son propre rythme. De ce fait, on ne peut utiliser l’âge des acquisitions des grandes étapes motrices comme seul repère pour déterminer s’il y a un retard de développement, car il y a trop de variabilité entre les enfants.


Information, éclairage

Ce qui restera sur le long terme – et jusqu’à l’âge adulte – c’est la qualité du mouvement.


Il importe donc de lui offrir l’environnement le plus enrichissant possible afin qu’il puisse développer son corps, son esprit, ses relations sociales…


Mais comment faire pour que le bébé développe au mieux sa motricité, sans pour autant le surcharger ?

La solution : la motricité libre.


Dans cet article, découvrez en détail comment la motricité libre aide le développement du bébé. Vous connaîtrez ainsi ses avantages et bienfaits pour l’épanouissement de votre enfant et comment la pratiquer à la maison.


Qu’est-ce que la motricité libre


Le concept de motricité libre a été rendu populaire par Emmi Pikler, pédiatre hongroise de la pouponnière Lóczy. Elle y a établi un cadre dans lequel les enfants ont la liberté de bouger, sans être contraints par du matériel et sans que l’adulte ne leur impose de position qu’ils ne sauraient prendre seuls. Elle a ensuite étudié puis analysé le comportement du nouveau-né jusqu’à la marche. Vous retrouverez plusieurs de ses recherches dans le livre Grandir autonome.


La motricité libre consiste à encourager l’enfant à explorer par lui-même ses différentes compétences motrices, selon ses intérêts et ses capacités.


Il n’est pas question de le diriger dans ses choix, mais plutôt de le guider, de l’accompagner dans ses avancées, en lui laissant la possibilité d’expérimenter et de découvrir les choses par lui-même,en veillant systématiquement à sa sécurité.


Pour cela, on laisse l’enfant suivre les étapes du développement moteur. Il pourra expérimenter les retournements, le ramper, le quatre pattes, comment se tenir assis seul, se verticaliser… pour finalement tenir debout. Quand il se sentira prêt, il pourra marcher tout seul.



Attention

On évitera de mettre un bébé dans une position qu’il ne sait pas prendre seul. On évitera donc d’asseoir bébé, de le mettre debout … Chacune des étapes, le long de son chemin moteur, a de l’importance pour développer sa musculature, son contrôle moteur, sa représentation corporelle…


Il serait vain d’apprendre à marcher aux jeunes enfants comme on leur enseignerait les mathématiques ou le français. Il est préférable de les encourager dans la découverte de leurs capacités motrices par l’expérimentation dans un environnement adapté, dans lequel ils seront libres de leurs mouvements.


Le concept de motricité libre montre comment accompagner le développement de l’enfant (notamment de sa motricité) en suivant ses besoins naturels, en découvrant les sensations et les mouvements. Dans la motricité libre, l’enfant retrouve un certain nombre d’instincts et de besoins physiologiques pour mieux développer son cerveau, sa socialisation, sa capacité à communiquer avec les autres...


Si je reviens à ma carte.

Pour vous rendre de chez vous à votre travail sans connaitre les lieux, ce que vous aller faire, c’est d’explorer toutes les routes qui existe pour trouver celle qui vous convient le mieux.


Vous pouvez également demander des indications aux personnes sur la route (sociabilisation, communication).


Vous me direz oui, mais je peux utiliser un GPS ce sera plus rapide! Peu être, mais on n’aura pas les bienfaits vus précédemment. Et surtout cela va être une des causes des troubles de la motricité, je vous en reparle plus loin.

Les bienfaits de la motricité libre pour votre bébé

Bébé agile rigolo dans une caisse.

Continuons sur l’exploration de votre nouveau trajet maison-travail.


Plus vous aurez exploré les différentes options qui existent, plus vous aurez confiance dans quel est le meilleur trajet.


Maintenant que se passe-t-il si vous utiliser un GPS c’est-à-dire une aide à l’orientation comme pouvait l’être le youpala, les transats, les sièges en position assise… dans une aide à l’acquisition des transitions motrices. Le GPS va vous donner UNE direction directement vers l’arrivée.


Mais que va-t-il se passer si vous enlevez le GPS (c’est-à-dire votre assistance à la motricité) et qu’il y a un accident qui bloque la route (c’est-à-dire un obstacle sur le chemin moteur. Cet obstacle peut être un objet à franchir ou l’apparition soudaine d’une chute).


Vous vous retrouvez bloquer dans les bouchons. Tous comme il arrive que l’on retrouve des bébés bloqués dans leur développement (bloqué aussi) ou avec des absences de réaction parachutent. Car ils n’ont pas découvert d’autres chemins d’autre option.


Alors que si vous n’aviez pas de GPS dès le début, vous aurez passé du temps à explorer toutes les routes qui existent.


Et en cas d’accident il vous aurait était facile de trouver une alternative.


Le bébé en motricité libre augmente le nombre d’explorations est donc sa capacité à s’adapter à plus de situations

De nombreuses études démontrent les bienfaits de la motricité libre pour favoriser le développement moteur et global. Les bébés qui ont évolué dans un environnement stimulant et adapté à leurs compétences, sont plus à même de développer une bonne santé physique et mentale.


Un bébé qui peut à tout moment bouger –c’est-à-dire se déplacer, se lever, se retourner, s’agenouiller, ramper, marcher – sans être contraint par du matériel l’empêchant de réaliser les mouvements dont il a besoin, pourra alors travailler une diversité de mouvements beaucoup plus importante, ses coordinations, apprendre à maitriser son équilibre, améliorer ses amplitudes articulaires...


Avec ce bagage moteur, il saura davantage s’adapter à toute nouvelle situation avec habilité et agilité.


Dès la naissance, quand le nourrisson commence à tenir sa tête, il connaît ses premières découvertes motrices. Puis, quand tout petit, il est libre de bouger, vous lui permettrez d'expérimenter progressivement des situations de plus en plus difficiles, il développera alors différents réflexes de protection, limitant les risques de grosse blessure.


Si je prends l’exemple des réactions parachute (qui consistent à mettre ses deux mains en avant pour se protéger), avec la motricité libre le bébé expérimente le repousser du sol lorsqu'il sont sur le ventre. Dans cette position, laisser tomber la tête est sa première chute. Mais à cette hauteur cela ne représente pas de risque.


Une fois qu’il maîtrise cette position, il effectuera des "pompes" , une autre réaction de parachute avec plus de hauteur. Puis il ajoutera de la déstabilisation avec le quatre pattes qui, lorsque vous regardez un enfant avancer dans cette position, n’est rien d’autre qu’une succession de réaction parachute. Encore une fois, s’il y a un louper, il ne se fera pas trop mal.


Enfin vient la période de verticalisation : bébé commence à se redresser. Au début, il se met à peine sur le genou et revient au sol en mettant sa main vers le bas. En prenant confiance dans ses capacités à se protéger, il se hissera de plus en plus haut pour passer par le chevalier servant avant de se retrouver debout. Cela fait partie de l’intérêt à suivre les chemins du développement moteur.


(Si tu souhaites connaitre plus en détail chaque étape du développement moteur, je te conseille de télécharger ta boite à outils de la motricité)


En pratiquant et en expérimentant, le jeune enfant gagne en confiance en lui, en ses capacités. Il osera plus et gagnera en autonomie motrice. C’est-à-dire, il sentira en lui qu’il a des bases solides pour découvrir le monde qui l’entoure.

A contrario, un enfant habitué à rester dans un transat que l’on place dans une youpala pour qu’il “marche” parviendra à faire ses premiers pas, mais la qualité du mouvement, et surtout les réactions parachutes, n’auront pas été travaillées et s’avèreront moins efficaces. Avec finalement,à terme, un plus grand risque de se blesser et de développer des difficultés motrices.

Information, éclairage

L’une des observations d’Emmi Pikler dans le service d’urgence pédiatrique, est qu’il y avait proportionnellement plus de fractures chez des enfants issus de milieux dits favorisés entourés de matériel, que dans les milieux précaires où les enfants étaient placés au sol et libres d’expérimenter leurs capacités motrices.

Enfin, la motricité libre permet de stimuler le système nerveux de bébé et l’aide à pleinement développer ses compétences affective, langagière, cognitive, sociale ainsi que sa motricité fine, ses capacités de préhension de jouets ...

Enfant qui marche en foret

Comment la motricité libre peut-elle aider les bébés ?

Le nouveau-né apprend beaucoup en observant, en imitant et en expérimentant.

Notons que le jeune enfant est doué d’une grande curiosité, d’une grande inventivité et d’un désir de comprendre le monde et les choses qui l’entourent.


Le bébé est tel un·e sportif·ve commençant une nouvelle activité. Si vous débutez en tennis vous n'apprendrez pas à taper dans la balle comme Federer du jour au lendemain ! Vous devrez vous entraîner, répéter les mouvements, commettre des erreurs pour intégrer comment bien réaliser les gestes. Chez le tout petit, c’est le même processus : sa nouvelle et première activité sportive sera d’apprendre par lui-même à bouger.


Ainsi, la motricité libre constitue une manière d’aider l’enfant à développer ses propres compétences par lui-même.


Lorsque le bébé n’est pas contraint par du matériel extérieur, il devient libre de choisir les mouvements qu’il souhaite réaliser. Il sera alors plus enclin à les répéter.

La répétition des mouvements est justement l’occasion pour bébé de s'entraîner et d’améliorer la qualité de ses gestes.


Cela l’aidera à bien acquérir ses capacités motrices et à travailler ses appuis pour savoir comment s’en servir.

C’est une chose de se déplacer en marchant et d’avoir une marche de bébé de qualité, efficace.



Bébé debout

La motivation procurée par le libre choix du bébé dans ses mouvements, son activité, etc. est plus importante que lorsque l’on impose ses choix en tant que parent à son bébé. Avec cette motivation accrue, bébé acceptera de plus s'entraîner, de plus bouger et, par conséquent, de faire plus de mouvements. Et donc, plus travailler sa motricité pour faire ses apprentissages.


En effectuant une diversité de mouvements plus importante, les bébés acquièrent un bagage moteur plus varié leur permettant de s’adapter plus facilement à toutes les situations qu’ils rencontreront plus tard notamment celle présentant un danger comme la descente des escaliers ou du canapé. On verra alors des enfants plus agiles.


Prenons quelques exemples classiques :

➡️ La position assise. La difficulté dans cette étape est de gérer le tonus. Pas assez de tonus, bébé ne tiendra pas la position ; trop de tonus et il se raidira, gardera la position mais complètement bloqué avec trop de tension. (Cela se produit souvent lorsque l’on installe les enfants assis trop tôt.)


Chez certains enfants, le risque est alors de les voir marcher sur les fesses parce qu'ils n’auront pas la conscience de diminuer leur tonus, de s’enrouler et mettre les main pour revenir au sol.


➡️ Les premiers pas nécessitent un bon contrôle et une coordination fine des 3 articulations des membres inférieurs et du tronc.


Si on place des bébés trop tôt debout, certains d’entre eux vont très bien tenir la position, mais en étant raides sur leurs jambes. S’ils n’ont pas eu l’occasion de travailler la mobilité dans des situations plus faciles, comme le ramper et le quatre pattes…, quand ils commenceront à se déplacer debout, la marche risque d’être raide, robotique et instable.


En respectant les chemins du développement de l’enfant et les principes de la motricité libre, l’adulte permet au bébé d’améliorer sa motricité progressivement, en augmentant en difficulté après avoir maîtrisé les étapes précédentes.



Les limites de cette approche et les notions erronées

Bébé à quatre pattes, commence à grimper sur un canapé

Trop souvent, on entend dire que la motricité libre c’est laisser l’enfant faire seul.


En réalité, la motricité libre c’est laisser l’enfant faire le maximum par lui-même et n’intervenir que si cela est vraiment nécessaire pour l’accompagner dans ses progrès.


Ce qui est différent de laisser l’enfant seul. En effet, il a besoin de garder le contact humain pour rester en relation, s’exprimer, échanger, créer du lien, etc. La présence de l’adulte, pour l’accompagner, l’aider et le stimuler est donc indispensable.


En motricité libre on ne pose l’enfant que sur le dos. Cela faisait partie des premiers principes d’Emmi Pikler. Mais aujourd’hui on sait qu’il est important de proposer la position plat ventre dès la naissance afin que le bébé puisse la découvrir. Le tummy time, cette pratique venue des États-Unis pourra t'y aider.


Au risque, sinon, qu’ il n’aime pas cette position et d’engendrer des difficultés motrices par la suite. Les positions sur le dos et sur le ventre sont les deux plus stables pour les bébés, au même titre que les côtés pile et face d’une pièce de monnaie.


Il n’y a qu’à regarder comment est placé le bébé sur ses parents après la naissance : enroulé sur le ventre.

Compléter la motricité libre

De nouvelles approches viennent compléter ce que Emmi Pikler a partagé dans ses ouvrages.


On retrouve la notion de “sensorimotricité”. Pour exprimer le besoin de l’enfant de ressentir son corps, ses mouvements et ses postures afin de pouvoir réaliser un mouvement de qualité.


L’expression “création de l’axe”, évoquée par Albert Coeman, apporte des informations sur les processus de progression graduelle de contrôle du corps.

Je vous parlerais de tout ça dans un prochain article


Enfin, je te partage 10 réflexions pour mettre en place la motricité libre à la maison.

Enfant joue sur de la musique

Conclusion


Accompagner et aider son enfant à développer sa motricité ne s’improvise pas.

Nous devons différencier nos attentes en tant que parents des besoins réels de l’enfant.

Information, éclairage

Comme le dit Emmi Pikler : « une bonne observation du bébé est le prérequis pour une bonne compréhension de son enfant » et lui proposer des stimulations adaptées.

Finalement, l’âge de la marche est moins important que d’observer la bonne qualité de celle-ci. La motricité libre a pour vocation d’accéder à cette bonne qualité.

👇Et vous, dites-moi en commentaire ce que vous pensez de la motricité libre et arrivez-vous à la mettre en place à la maison?👇

Bibliographie :

Forestier M. De la naissance aux premiers pas: accompagner l’enfant dans ses découvertes motrices. 2015. (https://michele-forestier.fr)


À nous de jouer! : le développement moteur de l'enfant, un pilier important du développement globa (https://collections.banq.qc.ca/ark:/52327/3214737)



https://bougribouillons.fr/


https://www.pikler.fr/emmi-pikler/la-motricite-libre-selon-emmi-pikler/


Albert Coeman, De la naissance à la marche


et bien d'autres ...


Boite à outils motricité de. bébé





jonathan gillaux kinésithérapeute

Jonathan

Kinésithérapeute en pédiatrie