Comment bébé apprend-il à gérer son équilibre
L’idée de consacrer un article à l'apprentissage de l’équilibre du bébé m’est venue en voyant la photo de Jean Dieuzaide : Mariage de funambule.
Quelles étapes suit un nouveau-né pour réussir à tenir en équilibre sur ses deux jambes voire, pourquoi pas, aller jusqu’à marcher sur un fil ?
Qu’est-ce que l’équilibre de bébé ?
Comme toute chose sur Terre, les bébés doivent lutter contre la gravité qui a tendance à les attirer au sol.
Finalement, l’équilibre c’est le fait de ne pas tomber.
Cette compétence motrice fait partie de la motricité globale. À terme elle devra devenir réflexe, c’est-à-dire que cet ajustement deviendra automatique et que votre enfant n’y pensera même plus.
Et pour pouvoir comprendre comment bébé acquiert cet équilibre,deux éléments doivent être développés en préambule : le centre de gravité et le polygone de sustentation (promis on va faire très simple pour les non-matheux·ses !).
Pour illustrer le centre de gravité, imaginons tout le poids de notre corps concentré en un seul point.
La localisation de ce point dans l’espace sera fonction de la répartition du poids et de la position de chaque membre. Par exemple chez l’adulte debout, il est situé au niveau du bassin.
Le polygone de sustentation (ou zone de supoport) est la surface au sol entre tous les points d’appui au.
Par exemple, chez un bébé à quatre pattes, c’est la surface du rectangle entre les deux mains et les deux pieds.
Plus le centre de gravité est haut et/ou plus il jouxte la limite du polygone de sustentation (que l’on détaillera ci-après), moins le corps est stable.
On a alors deux types d’équilibre possibles :
Le premier est l’équilibre statique, la compétence motrice pour maintenir une position stable sans bouger. On parle alors souvent de posture à tenir.
Par exemple : la position assise, rester debout ou sur un pied…
Pour cela, le centre de gravité doit être maintenu au-dessus du polygone de sustentation.
Si le centre de gravité n’est plus au-dessus du polygone de sustentation, il y a chute.
Sauf si bébé rattrape sa chute en venant mettre un appui provisoire, permettant la création d’un nouveau polygone de sustentation.
Bébé est alors en équilibre dynamique. L’équilibre dynamique est la compétence motrice qui permet d’éviter la chute lorsqu’on est en mouvement, comme durant la marche, le vélo ou le quatre pattes.
Garder l’équilibre est un jeu de positionnement du centre de gravité par rapport polygone de sustentation.
Bébé doit avoir conscience à tout moment où se situe son centre de gravité et où est son polygone de sustentation.
Pour cela il sollicitera ses sens vestibulaire (l’oreille interne), visuel (les yeux) et proprioceptif (capacité du corps à connaître la position de tous ses membres dans l’espace grâce à des récepteurs dans les tendons, ligaments, muscles,…).
Et à partir de ces informations sensitives, bébé pourra ajuster la position de son corps grâce à ses compétences motrices : dextérité, force, précision,…
Les étapes d’acquisition de l’équilibre du bébé.
Encore une fois la Nature a bien fait les choses et toutes les étapes du développement moteur ont leur importance.
Lorsque bébé se trouve sur le ventre ou sur le dos, le polygone de sustentation est très large et le centre de gravité est forcément dessus. Ce sont donc des positions très stables.
Le retournement consiste à mener le centre de gravité au-delà du polygone pour faire basculer le corps. C’est la première recherche d’un déséquilibre pour amener un mouvement.
Dans la position quatre pattes, le polygone de sustentation reste très grand, mais le centre de gravité est situé plus haut (donc moins stable).
Pour marcher à quatre pattes, il faut lever un bras ou une jambe. Le polygone, qui ressemblait à un rectangle, prend tout d’un coup la forme d’un triangle et diminue par la même de surface, ce qui complexifie légèrement l’équilibre de bébé.
Lorsque bébé avance à quatre pattes, c’est le premier vrai équilibre dynamique.
Pour cela, il avance son centre de gravité au-delà du polygone de sustentation et rattrape la chute avec sa main.
Il commence à se mettre en position assise. Le polygone de sustentation se réduit et le centre de gravité monte. Ceci lui permet de travailler son équilibre.
Puis bébé se redressera à genoux. Son polygone de sustentation n’est plus qu’un carré entre les genoux et la pointe des pieds. Son centre de gravité se situe à peu près au niveau du ventre.
En poussant en position à genoux redressé, le centre de gravité monte, ce qui fait augmenter l’instabilité.
L’une des prochaines étapes sur les chemins du développement moteur du bébé, c’est le passage au chevalier servant. À ce moment, le polygone de sustentation n’est plus que la surface de la jambe au sol avant qu’un troisième appui, le pied, vienne rééquilibrer et élargir le polygone de sustentation.
Vient ensuite la position debout. Le polygone de sustentation n’est plus qu’un simple rectangle entre les talons et les pointes de pied du bébé.
En grandissant, il rapprochera ses jambes, ce qui réduira encore son polygone de sustentation.
Maintenant, bébé fait ses premiers pas. Il se retrouve alors par moment sur un seul pied et son polygone de sustentation n’est plus que la surface de son pied. Il va rapidement agrandir ce polygone en venant reposer son autre pied afin de garder l’équilibre.
Finalement, la marche est un enchaînement de chutes rattrapées, qui permet un équilibre dynamique.
Et avec un peu de pratique, on peut venir jusqu’à marcher sur une poutre ou un simple fil, ce qui réduit drastiquement le polygone de sustentation.
Vous voyez que pour progresser dans la gestion de son équilibre, chaque étape du développement moteur permet à l’enfant d’apprendre à gérer la position de son centre de gravité, qui montera de plus en plus haut au-dessus d’un polygone de sustentation qui, lui, se réduit progressivement.
Comment stimuler et améliorer l’équilibre de bébé
Vous l’avez compris avec le précédent chapitre : l’équilibre est une gestion du centre de gravité dans l’espace pour qu’il reste au-dessus du polygone de sustentation (équilibre statique) ou du polygone de sustentation qui va bientôt arriver (équilibre dynamique).
Ceci n’est possible que si les sens de l’équilibre sont performants et que la gestion motrice est efficace.
Il faudra donc travailler ces deux éléments en coordination en stimulant la motricité de bébé dans le bon sens
L’oreille interne pourra être stimulée dès les premiers jours de vie grâce aux portages (dans les bras ou en écharpe). Ceci permettra à bébé de ressentir les mouvements dans l’espace. Et par la suite d’adapter son tonus musculaire.
Un peu plus grand, vous pouvez jouer avec votre enfant sur un gros ballon de grossesse. Il y aura alors plus de recrutement musculaire pour essayer de se rattraper du déséquilibre imposé par le ballon, recrutement indispensable pour l’équilibre du bébé ultérieurement.
Puis à chaque étape de son développement, laissez votre bébé faire un maximum de découvertes motrices. C’est là que la motricité libre prend tout son sens, car s'entraîner, c’est répéter et répéter encore pour améliorer la précision de ses sens et de ses compétences motrices indispensables à l’équilibre.
Les stimulations viendront de tous les éléments de l’environnement de bébé.
Vous pouvez également proposer à bébé des activités motrices adaptées à son niveau de gestion de l’équilibre en créant des parcours de motricité.
Par exemple, des activités de précision (attraper des jouets, les porter ou, plus grand, taper dans un ballon) permettront à bébé d’améliorer son sens proprioceptif.
Enfin vient le moment des premiers pas et de l’équilibre à la marche. Veillez au matériel de puériculture sélectionné : les trotteurs court-circuitent les informations sensorielles de gestion du centre de gravité ainsi que la représentation du polygone de sustentation, ceci pouvant entraîner des difficultés motrices chez l’enfant à court ou moyen terme.
Dernière réflexion autour des premiers pas : on a souvent tendance à tendre nos doigts pour que bébé s’y accroche. En agissant ainsi, c’est vous qui gérez l’équilibre de votre bébé avec des bras qui deviennent fixes, alors qu’à cette étape il devrait être en mouvement pour gérer cet équilibre.
Il est alors préférable de le soutenir au niveau du bassin, car c’est là que son centre de gravité vient se positionner.
Conclusion
L’équilibre fait partie des compétences nécessaires à une bonne motricité. Comme tous les apprentissages, il nécessite du temps, de la répétition et une augmentation progressive en difficulté.
Chaque étape du développement moteur permet à bébé cet apprentissage sereinement et en toute sécurité.
Celle-ci sera possible avec une maturation du système nerveux de votre enfant.
👇Dites moi en commentaire où en est votre bébé dans la gestion de son centre de gravité et de son polygone de sustentation ? Tombe-t-il souvent?👇
Jonathan
Kinésithérapeute en pédiatrie