Comprendre et agir sur l’hypertonie et l’hypotonie du Bébé

L’idée de cet article sur l’hypertonie et l’hypotonie du bébé me vient d’une question posée par une maman sur Instagram : “Mon pédiatre m’a dit que mon enfant est hypertonique, qu’est-ce que cela veut dire ?”


Au vu de ce que l’on peut trouver sur Internet, j'ai décidé de refaire le point sur ce qu’est le tonus, les structures qui influencent la tonicité et comment elle évolue au cours du développement de l’enfant, avant d’aborder ce que l’on peut faire en tant que parent sur l’hypertonie ou l’hypotonie de son enfant. Enfin, j'évoquerai les rares cas de pathologies.

Comprendre et agir sur l'hypertonie, l'hypotonie du bébé

Le tonus musculaire : c'est quoi au juste ?

Le tonus, c'est la légère contraction réflexe continue des muscles lorsque Bébé est au repos. Imagine que c'est un état de base de ses muscles, un peu comme une tension constante, lui permettant de créer et maintenir la structure de son corps ;c’est le socle sur lequel il s'appuie pour bouger.


On distingue deux types de tonus :

  • 1. Le tonus de fond ou de base. Il permet de maintenir le corps dans une position. Son principal rôle est de lutter contre la gravité afin de maintenir la posture.
  • 2. Le tonus d’action ou dynamique. Il s’agit du tonus du muscle directement ou indirectement nécessaire pour pouvoir réaliser le mouvement.

Ainsi le tonus variera d'une faible tonicité (hypotonie) à une forte tonicité (hypertonie).

Qu’est-ce que l’hypertonie chez Bébé ?

L'hypertonie, c'est lorsque le tonus musculaire de Bébé est augmenté. En d'autres termes, ses muscles sont plus tendus et ont une contraction de base plus importante.


L’hypertonie rend les réflexes du bébé plus prononcés. En conséquence, vu de l’extérieur, ton bébé bouge plus, il paraît plus actif.


Information réflexe myotatique et hypertonie

Cela est notamment dû au réflexe myotatique exagéré. Le réflexe myotatique est, comme son nom l’indique, un réflexe du muscle qui va se contracter en réponse à son propre étirement.


Lorsque Bébé fléchit rapidement son genou, cela étire le quadriceps. En réaction, celui-ci va se contracter et tendre la jambe qui va venir étirer les ischios-jambiers. À leur tour, ces derniers se contractent rapidement et fléchissent les genoux. C'est pourquoi, lors de la phase hypertonique, on observe Bébé fléchir et tendre rapidement sa jambe ou son bras.

Pour te donner une idée de ce qui se passe pour ton enfant : imagine que tu es stressé·e, agacé·e, tu te sens contracté·e (augmentation de ton tonus de base) et que le moindre bruit te fait sursauter (réflexe exacerbé).

Qu’est-ce que l’hypotonie chez les bébés ?

À l’inverse, lorsque le tonus musculaire de Bébé diminue, on parle d’hypotonie. C'est-à-dire que la tension musculaire de base du muscle est réduite. Le corps du bébé paraît alors plus "mou". Les Anglais·es parlent de bébé Fluffy.


Son corps semble avoir moins de structure, ce qui peut rendre ses mouvements plus compliqués. Il peut apparaître, ainsi, plus passif.


C'est un peu comme quand tu es tout·e détendu·e dans un bain chaud le week-end, et que tu réagis plus lentement aux évènements autour de toi.

Par quoi le tonus est-il influencé ?

Le tonus du bébé – et donc l’hypotonie et l’hypertonie – est influencé par plusieurs facteurs, tant internes qu'externes.

  • La corne spinale (centre du réflexe myotatique au niveau des vertèbres)
  • Le développement du contrôle volontaire du mouvement (aura plutôt un rôle inhibiteur)
  • Les systèmes de contrôle des mouvements involontaire (peut être inhibiteur comme excitateur)
  • L'hypothalamus (rôle inhibiteur)
  • L'état émotionnel (selon l’état de l’enfant, inhibiteur ou excitateur)
  • L’état relationnel (selon ses besoins, inhibiteur ou excitateur)
  • Les flux sensoriels (ce qui est agréable inhibiteur, ce qui est désagréable excitateur)

Chacun de ces facteurs peut avoir un effet d’augmentation ou de diminution du tonus. Et la somme de ces informations donnera le tonus de ton enfant.

Structures qui influencent le tonus

L'évolution du tonus chez le nouveau-né

C’est là qu’entre en jeu la maturation du système nerveux, qui n’est pas mature à la naissance. Il ne se réalise pas nécessairement à la même vitesse selon les structures et selon les enfants.


Nous avons vu précédemment que différentes structures impactent le tonus. Si les structures qui ont tendance diminuer le tonus se développent en premier, l’enfant aura tendance à être plus hypotonique. À l’inverse, si les structures augmentant le tonus se développent en premier, Bébé aura une tendance à l’hypertonie.


Chez la plupart des enfants, on observe donc différentes phases durant lesquelles sa tonicité évoluera selon son développement.


Classiquement, on retrouve les phases suivantes (qui peuvent varier selon les enfants) :

  • Le fœtus est, pendant les six premiers mois de grossesse, en hypotonie globale et en position d’enroulement dans l’utérus.
  • À la naissance, le nouveau-né a une hypotonie du tronc et du cou, mais une légère hypertonie des fléchisseurs dans les bras et les jambes. Ce qui explique la position de Bébé recroquevillé sur lui-même avec les membres fléchis.
  • Cas particulier du prématuré qui a plus d'hypertonie, en raison du manque de maturité de son système nerveux.
  • Va suivre une phase où le tout-petit navigue entre l'hypertonie et l'hypotonie, avant de trouver un équilibre tonique vers 8-10 mois.

Qu’est-ce qui impacte le tonus du nouveau-né ?

Dans le paragraphe précédent, nous nous sommes intéressé·es à l’évolution dans le temps long.


Maintenant, abordons les impacts des éléments de la vie courante sur le tonus, sans oublier que leur impact sera à mettre en relation avec la maturation du système nerveux.


  • Les flux sensoriels (le toucher, la vue, l’ouïe, l’odorat, le goût, la température…).
    De manière générale, ce qui est agréable pour Bébé entraînera une diminution du tonus, et ce qui est désagréable, l’augmentation du tonus.
    Ainsi, les mouvements brusques, les sons secs ou trop forts, les odeurs désagréables… augmenteront le tonus.
  • L’état émotionnel du Bébé influence le tonus. S’il est stressé ou apeuré, le tonus augmente. Si ses besoins relationnels sont comblés, il aura une diminution du tonus.
  • L’état de vigilance du nouveau-né, c’est-à-dire plutôt vers l’endormissement (hypotonie) ou plus en phase d’éveil (hypertonie).
info hypertonie d’appel et hypotonie de satisfaction

Au vu du rôle prépondérant du tonus comme outil de communication, les psychomotricien·nes distinguent hypertonie d’appel et hypotonie de satisfaction.

  • L’intégration des réflexes (eux aussi soumis à la maturation du système nerveux) joue sur l’augmentation du tonus, de moins en moins présent au cours du développement.

Comment reconnaître si mon bébé est dans une phase hypertonique ?

Plusieurs signes indiqueront que ton enfant est dans une phase hypertonique :

  • Bébé agité, qui bouge beaucoup avec des mouvements répétitifs mal maîtrisés. Ceci est notamment dû au réflexe myotatique évoqué plus haut.
  • Lors des changes ou pour le mobiliser, il est plus difficile de lui fléchir les bras ou les jambes en raison de la résistance accrue de ses muscles.
  • Lorsque Bébé est mis sur ses pieds, il tend les jambes comme "pour tenir debout" (attention, ceci est un réflexe non volontaire. Cela ne signifie pas que ton enfant souhaite se mettre debout).
  • Lorsque ton enfant est sur le ventre, il lève la tête et les jambes, ou, sur le dos il amène sa tête en arrière. Ici aussi c’est le réflexe d’extension qui est majoré. Il importe d’y faire attention pour éviter l’installation de torticolis positionnel du bébé.
  • La main est fermée autour du pouce.
  • Difficultés pour se détendre.

Les conséquences de l'hypertonie sur la motricité

Les phases d’hypertonie sont intéressantes pour Bébé, car cela lui permet de travailler sa motricité, de ressentir des mouvements qu’il n’aurait pas découverts autrement.


Lors de cette phase, il va également renforcer sa musculature.


Toutefois, une hypertonie trop importante peut gêner sa motricité. Cela complexifiera la réalisation de certains mouvements, comme les retournements, les ramper. En effet, Bébé aura tendance à se tendre et bloquer ses mouvements. Il faudra impérativement l’accompagner avec des stimulations adaptées pour qu’il apprenne à gérer son tonus.


C'est au cours de cette phase qu’il va apprendre à gérer volontairement son tonus pour que cela devienne ensuite automatique.


On pourra par ailleurs voir des bébés qui s’agacent et s’énervent plus facilement, parce qu'il y aura un décalage entre leur souhait et la précision de leur mouvement.


Attention hypertonie ne veux pas dire hyperactif

Notons qu'un bébé qui bouge beaucoup n'est pas nécessairement un enfant hyperactif. L'hyperactivité répond à une définition précise, réalisée par un·e professionnel·le de santé formé·e et ne peut être diagnostiqué qu'à partir de 3-4 ans (cela exclut donc les nourrissons).


L’hypertonie – et un bébé qui bouge beaucoup – est une phase tout à fait normale du développement moteur et ne permet pas de présager d’une hyperactivité.

Quoi faire dans les phases d'hypertonie ?

Il n'y a pas de solution miracle, car une grande partie est en lien avec la maturation du système nerveux. Toutefois, des actions peuvent aider à réduire la tonicité de ton bébé.


L'objectif est de l’aider à comprendre comment calmer ses tensions pour améliorer le contrôle de sa motricité.


En voici une liste non exhaustive ; à toi de voir celle qui fonctionne le mieux pour ton enfant !

  • Proposer des stimulations douces et englobantes
  • Faire des massages à visée relaxante
  • Proposer régulièrement de l’enroulement
  • Proposer des portages physiologiques
  • Observer et modifier les flux sensoriels qui augmentent le tonus (lumière ou musique trop forte, odeurs prononcées, température trop élevée…) : tu peux les remplacer par des musiques douces ou bruit blanc, aérer quotidiennement la pièce de vie, surtout si tu viens de cuisiner.
  • Observer son état émotionnel et répondre à ses besoins de base (faim, change, stress, peur …).

Par moment, tu peux avoir répondu à tous ses besoins de base, mais ton bébé continue à ne pas être à l'aise et à pleurer. Cela ne fait pas de toi un mauvais parent ! Nous avons vu que plusieurs autres facteurs, sur lesquels tu ne peux pas intervenir, vont influencer l’état tonique de ton enfant.

Comment reconnaître si mon bébé est dans une phase hypotonique ?

Les traits caractéristiques d’une phase d’hypotonie du bébé :

  • Bébé peut sembler mou,
  • ses mouvements sont plus lents,
  • il est moins expressif du visage,
  • il peut avoir du mal à pratiquer sa motricité de manière visible.

Les conséquences de l'hypotonie chez Bébé

En cas d'hypotonie, les mouvements sont plus durs à réaliser. Il a donc moins la possibilité de pratiquer sa motricité visible.


Cela peut entraîner et expliquer un décalage dans les apprentissages moteur. C’est pourquoi je n’aime pas me contenter de l’âge pour suivre l’évolution du développement moteur. En effet, c'est peut-être un bébé qui a une maturation de son système nerveux similaire aux autres enfants, mais qui se fait en premier sur les structures qui réduisent le tonus. Dès que les autres structures se développeront, il rattrapera son décalage.

Comment stimuler un bébé hypotonique ?

Pour stimuler un bébé en phase d'hypotonie, il est recommandé de favoriser les mouvements volontaires. Pour cela, tu peux :

  • utiliser des appuis désagréables l’incitant plus à bouger,
  • privilégier la comptine dynamique avec du mouvement,
  • des portages en petit bouddha,
  • des massages dynamiques,
  • trouver un objet, une activité qui attire tout particulièrement ton enfant.

Quand s'inquiéter des troubles de la tonicité ?

L’objectif premier de cet article est de te montrer que les variations du tonus de l’hypotonie à l’hypertonie sont tout à fait normales dans le développement de l’enfant. J’en avais marre de lire sur internet des raccourcis rapides : Hypotonie ou hypertonie = pathologie. Ce qui a tendance à amener du stress inutile chez les parents.


Toutefois, je ne peux pas faire l’impasse sur cette possibilité.

L'hypertonie et l'hypotonie se révèlent problématiques – voire signe d'une pathologie – lorsque les variations toniques sont "anormales" (c’est-à-dire vraiment extrêmes) et ne sont liées ni au sexe, ni à l’âge, ni à la maturation du système nerveux ou à l’état de vigilance du bébé, et qui viennent entraver considérablement ses activités motrices et posturales ainsi que ses capacités d’expression.


La plupart des cas qui engendrent ces troubles sont diagnostiqués ou suspectés avant ou dès la naissance.

Par exemple

  • La trisomie 21 entraînera une hypotonie.
  • Les paralysies cérébrales, une hypertonie avec spasticité ou rigidité
  • Les pathologies génétiques, de l’hypertonie ou de l’hypotonie.

Mais ces cas sont d’une part rares, et la tonicité seule ne suffit pas à suspecter un trouble non diagnostiqué avant. Donc seul·e un·e professionnel·le de santé qui suit régulièrement ton enfant pourra faire les liens en recoupant toutes les informations à sa disposition.

Conclusion : Ne t'inquiète pas trop !

En résumé, les variations de tonicité font partie intégrante du développement de ton bébé. L’hypotonie et l’hypertonie ne sont pas synonymes de pathologie.


Cela peut provoquer des difficultés passagères pour lesquelles il faut apporter des stimulations adaptées.


En cas d’interrogation, il est essentiel de te rappeler que tu n'es pas seul·e dans cette aventure : parles-en à ton/ta pédiatre ou tout·e autre professionnel·le de santé.


D'autres parents peuvent vivre des situations similaires, alors n'hésite pas à partager ton expérience dans les commentaires !

Bibliographie :

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Jover, M. (n.d.). Perspectives actuelles sur le développement du tonus et de la posture.

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jonathan gillaux kinésithérapeute

Jonathan

Kinésithérapeute en pédiatrie